Sport-Santé: une stratégie nationale pour la santé physique et mentale

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La sédentarité, caractérisée par des périodes prolongées d’inactivité comme la position assise, augmente significativement les risques de maladies chroniques et de mortalité prématurée. Or, 30% des hommes et 40% des femmes de notre pays ne pratiquent pas d’activité physique au niveau des recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé. C’est dans ce contexte que le gouvernement français vient de dévoiler sa Stratégie Nationale Sport-Santé. La SNSS pour 2025-2030 place l’activité physique au cœur des politiques de santé publique, avec une attention particulière portée aux publics les plus éloignés de l’activité physique : jeunes, femmes, personnes en situation de handicap, seniors et patients atteints de maladies chroniques.

Activité physique : enjeu de santé publique majeur

Les chiffres parlent d’eux-mêmes : la non-atteinte des recommandations de l’OMS représente un coût social estimé à 140 milliards d’euros par an en France, avec plus de 38 000 décès et 62 000 maladies attribuables à cette insuffisance d’activité physique.

L’activité physique régulière constitue pourtant un facteur clé de prévention primaire et secondaire. Chez les enfants et adolescents, elle favorise un développement optimal des os, des muscles, et contribue aux capacités cognitives et à la santé mentale. Chez l’adulte, elle aide à prévenir et traiter les principales maladies non transmissibles : maladies cardiovasculaires, diabète de type 2, certains cancers, tout en améliorant le bien-être mental (Warburton et al., 2006).

Des bénéfices au-delà du physique

Car les bénéfices de l’activité physique s’étendent aussi à l’amélioration de la santé mentale (Schuch et al., 2018). Surtout si lorsque la pratique sportive permet de créer des liens avec d’autres. D’ailleurs la SNSS 2025-2030 intègre la santé mentale comme fil conducteur transversal, en cohérence avec la Grande Cause Nationale 2025.

Pour rappel, en France, près de 12 millions de personnes seraient concernées par des troubles psychiques chaque année, des troubles liés à l’anxiété, la dépression et le burn-out. Les troubles de Santé mentale coûteraient chaque année près de 110 milliards d’euros à la France, en raison de l’absentéisme, de la baisse de productivité et des dépenses de santé. Mais au-delà des chiffres, c’est la qualité de vie des individus et de leurs proches qui est profondément affectée.

Or, l’exercice physique agit comme un véritable antidépresseur naturel, stimulant la production d’endorphines et régulant les neurotransmetteurs impliqués dans l’humeur (Schuch et al., 2018). De plus en plus d’études démontrent que l’activité physique peut servir de régulateur du stress quotidien, améliorer le sommeil et l’humeur (Nakamura et al., 2018).

Le stress, phénomène trop banalisé parce que si répandu (par exemple associé à l’anxiété de performance, impacte la santé physique. Ainsi par exemple, le bruxisme considéré comme une « soupape au stress » (Slavicek, 2015″) pourrait être une courroie de transmission dans la majoration des douleurs orofaciales chroniques.

Améliorer l’accès à l’activité physique des personnes passant des heures assises devant leur ordinateur est perspective est particulièrement pertinente dans notre société où la sédentarité professionnelle domine. La stratégie nationale cible d’ailleurs spécifiquement les 10 millions de salariés les plus sédentaires, reconnaissant que l’environnement de travail constitue un facteur déterminant de nos comportements de santé.

Sport-Santé : dans tous les lieux de vie

Que peut-on espérer de la SNSS 2025-2030 ? Saluons au moins les principes qu’elle soutient. Elle se distingue par son approche globale, intervenant à tous les âges et dans tous les milieux de vie.

Dès l’école primaire, la généralisation des 30 minutes d’activité physique quotidienne, vise à ancrer des habitudes durables. Cette mesure, soutenue par des données probantes, s’appuie sur le fait que les comportements acquis pendant l’enfance conditionnent largement les habitudes de vie à l’âge adulte.

Dans l’enseignement supérieur, la stratégie prévoit le développement de Maisons Sport-Santé universitaires, reconnaissant que les étudiants cumulent de nombreux facteurs de risque : sédentarité + stress (associé à des troubles du sommeil et souvent à un certain isolement social). En moyenne, un étudiant passe plus de 8 heures par jour assis, et pour la plupart n’ont pas d’activité physique suffisante (selon les recommandations de l’OMS).

En ce qui concerne le milieu professionnel, la Stratégie nationale invite les entreprises à proposer des dispositifs de promotion de l’activité physique, en soulignant les bénéfices directs de cet effort : réduction de l’absentéisme de 30%, augmentation de la productivité de 6 à 9%, diminution du turnover de 25% pour les entreprises proposant des activités sportives sur le lieu de travail.

Maisons Sport-Santé : renforcer le maillage d’accès

Les Maisons Sport-Santé, lancées par la première SNSS, devraient être renforcées dans cette nouvelle version. Avec près de 540 structures déjà déployées sur le territoire, elles devraient constituer un point d’entrée privilégié vers une pratique adaptée. L’objectif est ambitieux : doubler d’ici 2030 le nombre de personnes accueillies et accompagnées, qu’elles aient ou non une prescription médicale.

Ces structures jouent un rôle dans l’accompagnement des publics les plus vulnérables, notamment les patients atteints de maladies chroniques. Par exemple l’expérimentation « As du cœur », a testé un programme d’activité physique adaptée pour des patients atteints de pathologies cardiovasculaires, a montré une diminution des dépenses de soins de 3 224 euros dans l’année pour les bénéficiaires, principalement sur le poste hospitalisation.

Il serait sans doute intéressant d’associer les acteurs de l’activité physique aux acteurs de la prévention, par exemple dans des programmes « d’éducation thérapeutique« , sans renoncer au sport en tant que loisir, espace de bien-être, de sociabilité… d’épanouissement.

Sport-Santé : tournant de la prévention ?

A l’heure où l’on cherche plus d’efficience dans tous les domaines, y compris dans le système de Santé, l’investissement dans la promotion de l’activité physique pourrait s’apparenter à un investissement significatif pour la société. Le document de promotion de la SNSS conclut d’ailleurs sur un calcul simple : chaque euro investi dans la prévention par l’activité physique économise plusieurs euros en soins curatifs, sans compter les gains en termes de qualité de vie.

La SNSS 2025-2030 marque-t-elle un tournant dans l’approche française de la santé publique, passant d’une logique curative à une logique préventive ? C’est un pari dont la réussite dépendra de l’engagement de tous les acteurs : collectivités locales, monde associatif, secteur éducatif, entreprises, professionnels de santé. Un tournant à saluer, à la condition que ce ne soit pas l’occasion de stigmatiser un peu plus les personnes qui ne parviennent pas à se conformer aux préconisations.


BIBLIOGRAPHIE

Herring, M. P., O’Connor, P. J., & Dishman, R. K. (2010). The effect of exercise training on anxiety symptoms among patients. Archives of Internal Medicine, 170(4), 321-331. https://doi.org/10.1001/archinternmed.2009.530

Nakamura, Y., Okada, T., Hara, Y., Tamura, N., Yoshioka, K., & Yoshino, K. (2013). Effect of exercise on mood and sleep quality in middle-aged women. Sleep and Biological Rhythms, 11(4), 237-244. https://doi.org/10.1111/sbr.12033

Schuch, F. B., Vancampfort, D., Richards, J., Rosenbaum, S., Ward, P. B., & Stubbs, B. (2018). Exercise as a treatment for depression: a meta-analysis adjusting for publication bias. Journal of Psychiatric Research, 77, 42-51. https://doi.org/10.1016/j.jpsychires.2016.02.023

Slavicek, R. (Préface). Le bruxisme tout simplement. 2015, Éditions CdP.

Warburton, D. E., Nicol, C. W., & Bredin, S. S. (2006). Health benefits of physical activity: the evidence. Canadian Medical Association Journal, 174(6), 801-809. https://doi.org/10.1503/cmaj.051351

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